Jours de pêche en Patagonie
Poster un commentaire9 janvier 2013 par Julie Curien
Le réalisateur argentin Carlos Sorin livre, avec Jours de pêche en Patagonie, Días de pesca dit la sobre V.O., un moyen métrage économe et sensible. Les spectateurs passent ainsi un bref moment en compagnie d’un cinquantenaire qui sort d’une cure de désintoxication alcoolique.
L’homme part dans les grands espaces pour une tabula rasa : renouer avec sa fille, qui l’a, peut-être, fui — et pourquoi pas, aussi, pêcher de plus gros poissons (c’est la saison des requins !), aka faire des rencontres — nous pénétrons collatéralement l’univers de la boxe latino-américaine, et c’est du bonheur, vu les acteurs. Nulle quête n’est aisée, l’homme, fragile, a le mal de mer & son rôle de père est tout autant mis à mal.
Mais il continue d’avancer, en courant sur la plage, en souriant — humour timoré mais constant, sous-tendant une tendresse émergente et embarrassée —, en chantant — il aurait voulu donner dans l’opéra —, rétablissant, pas à pas, le contact avec les autres. L’acteur, Alejandro Awada, incarne parfaitement les émotions tempérées de la reconversion ; du passé, ne restent que des problèmes (psychosomatiques ?) de santé.
La Patagonie constitue le personnage principal décor du film. Les distances entre les hommes sont plutôt bien rendues par les longs trajets du père, de la fille et de son mari, qui traversent les paysages, déserts et immenses, pour tenter de se retrouver. L’intervention de l’humain, au sein de cette nature largement indomptée, est mal aisée, maladroite, entre le repli — le téléphone est une denrée rare, le pétrole… aussi — et le tapage — couleurs extrêmement vives de maisons et autres objets, marketing à visée touristique vantant les mérites de la Patagonie : mention spéciale au panneau rond « shark patagonia » avec un chouette dessin de requin.
A Puerto Deseado, le port « désiré » où le protagoniste se met à séjourner, se croisent des locaux, alertés sur les soirées « ze place to be » (musiques brésiliennes cette fois-ci) par la radio (seul canal de communication), ainsi que des individus, touristes ou professionnels, venus de part en d’autre du continent sud américain : la destination choisie constitue un lieu d’ancrage transitoire.

Au bord de la route…
Ce film d’action, intéressant, se laisse regarder, plutôt agréablement, mais mieux vaut lire entre les lignes car rien n’est évident ni dynamique : à regarder pour l’atmosphère, pour rêver et, peut-être, vous prendre d’affection pour ce port d’attache qui pourrait bien augurer un nouveau départ pour les pêcheurs de tous bords. Pour en savoir + : des entretiens avec le réalisateur ici et là, ainsi que cette chronique épurée et joliment tournée dont je partage l’avis !
J’allais oublier… l’anecdote qui va bien : le film est produit par Guacamole Films, boîte montée par un réalisateur qui ne manque pas d’humour…